MARIE-HELENE MONTENAY - octobre 1996 De son séjour à Rome, Eric Dalbis était revenu avec un enthousiasme pour les couleurs aériennes et évanescentes, lumineuses et impalpables comme l'atmosphère originelle de l'aube dans la campagne du Latium . Un nouveau mouvement de balancier, un nouveau souffle, le ramènent aujourd'hui du ciel à la terre, et d'une tension spirituelle à une énergie vitale. D'où un chromatisme beaucoup plus contrasté, exprimant une recherche de la densité qui transparaît dans le choix des ocres et des gris . Même si elle retrouve ainsi des préférences affirmées dans ses tableaux anciens aux tons foncés, la quête de l'artiste débouche ici sur des couleurs que leur nouveauté rend encore plus malaisément définissables que jadis . Simultanément, le resserrement de l'échelle des tableaux reflète aussi bien l'obsession d'une toujours plus grande densité, que le désir d'une peinture plus intimiste et toujours plus exigeante dans l'expression de la vie . Mais ce chromatisme, si difficile à nommer, dégage encore sa propre lumière, d'autant plus essentielle que densité ne signifie pas ici épaisseur, présence brute de la matière : Elle se concentre tout entière sur une surface, pour mieux parvenir à une synthèse une fusion de la forme et du fond au profit de celui-ci . Eric Dalbis abandonne ainsi la figuration ancienne des corps à l'intérieur de formes, qui créerait désormais un effet de redondance . Aujourd'hui la couleur est investie d'une fonction métaphorique d'expression des formes, tout comme une peau tendue renvoie à l'ensemble du corps humain et à la palpitation de la vie . Moins illustratif que dans sa période romaine , l'artiste atteint ici un nouveau point d'équilibre entre la vision du monde qu'il objective et la charge émotive qu'il nous communique , qui n'est pas loin , on peut le dire , de l'effet magique . Nul calcul ni règle dans cette démarche , mais une peinture qui ne procède en rien de l'esprit de géométrie ... Le tableau se constitue progressivement dans une superposition de surfaces colorées à la faveur desquelles, ou entre lesquelles, émergent des formes définies toutes entières par des interactions chromatiques qui simultanément donnent à l'ensemble sa respiration, son souffle vital . Après cela, difficile de gloser de manière littéraire sans risquer de se cacher l'essentiel . L'humilité de l'artiste face à son matériau, comme la demande muette de l'oeuvre qui ne nous propose aucune signification évidente, nous mettent au défi de faire l'effort d'un regard neuf . |